Une porte, un couloir, un monstre… 1/3

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Une porte…

Le comte Fénalik, ombre insaisissable, s’était volatilisé, d’après Pressis. Celui-ci jurait avoir vu cette silhouette monstrueuse se dissoudre en un nuage de fumée pour s’enfuir par une bouche d’aération. L’idée même semblait absurde, mais après tout ce que nous avions vu… qui pourrait encore présumer de ce qui était possible ?

Nous avions fouillé la demeure de fond en comble, du grenier aux chambres, sans aucune trace de cette abomination. Il ne restait qu’une dernière possibilité : cette porte, massive et oppressante, qui semblait se dresser devant nous comme un dernier rempart. La cave. Le cœur des ténèbres.

Nos corps portaient encore les marques des combats avec les valets du comte. Des créatures presque invincibles, plus bêtes que hommes, qui résistaient à tout sauf à l’ail, cette arme dérisoire qui les avait finalement terrassés. Si ses sbires étaient aussi redoutables, nous n’osons imaginer ce que leur maître, Fénalik lui-même, pourrait être.

Nous nous préparions du mieux que nous pouvions. Chaque soldat imprégnait sa baïonnette d’ail, frottait ses munitions de cette substance vulgaire mais miraculeuse. Étions-nous prêts ? Non, certainement pas. Mais nous n’avions pas le luxe de douter. Cette folie devait s’arrêter ici.

Illustration JdR Appel de Cthulhu, campagne "Terreur sur l'Orient-Express", scénario "Le Règne de la Terreur" - Monsieur le Comte Fenalique
Monsieur le Comte Fenalique

Face à la porte, notre escouade se tenait, à bout de souffle et d’espoir. L’atmosphère était lourde, presque suffocante. Dupois, Babin et Hugel, marqués par des blessures sérieuses, avaient été rafistolés par le docteur Rigault, mais leur condition restait précaire. Pourtant, ils étaient là, déterminés malgré tout. La présence de ces hommes, à peine capables de se tenir debout, semblait à peine suffisante pour affronter l’abîme qui se profilait devant nous.

Le sergent Renault, plein de bravade, tenta de briser la porte d’un coup d’épaule vigoureux. Rien. Pas un centimètre. Avec un soupir exaspéré, je pris les devants, balançant un coup de pied massif contre le bois qui vibra sous l’impact. La porte céda à peine. Finalement, c’est Babin, armé de ses outils, qui s’approcha, comme un horloger devant un mécanisme délicat. Un cliquetis salvateur brisa le silence, et la porte s’ouvrit enfin.

Derrière, un puits de ténèbres nous attendait. L’escalier plongeait dans une obscurité si épaisse qu’elle semblait vivante, résistant à nos lanternes vacillantes. La peur, cette compagne insidieuse, s’insinuait en nous, murmurant des promesses de démence à chaque creux et repli de cette descente infinie. Nos esprits, déjà ébranlés par les horreurs précédentes, vacillaient dangereusement. Chaque pas résonnait comme un glas dans cette ambiance oppressante, un rappel incessant que notre santé mentale était une corde tendue au bord du gouffre.

Le silence était assourdissant, brisé uniquement par nos respirations nerveuses et le grincement des bottes sur la pierre humide. Chaque marche descendue était un pas de plus vers l’inconnu. L’air lourd, chargé de promesses malsaines, semblait peser sur nos épaules, comme si nous étions traînés vers une folie inévitable.

Après ce qui sembla une éternité, nous débouchâmes sur un couloir. Long, infini, ses contours se fondaient dans les ombres. Ce n’était plus seulement la peur de l’inconnu. C’était la certitude que quelque chose d’ancien et de maléfique nous observait, caché dans l’obscurité. Et au-delà de cela, c’était le sentiment croissant que nous marchions sur le fil de la folie, prêts à sombrer à chaque instant dans l’abîme de l’horreur et de la démence.

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